C'est Potosi! 4060 m au-dessus du niveau de la mer. On y arrive a 4h du mat' apres 9h de Grand 8, euh de bus, pardon! J'ai jamais autant décollé de mon siege pendant un voyage en bus!
La ville est magnifique, des vieilles rues, de belles églises, de beaux monuments comme par exemple cette Casa de la Moneda :
C'est beau, hein? Normal, au XVIIIe siecle, c'était une des villes les plus riches et les plus grandes du monde (plus que Paris et Londres) grace a ses mines d'or et d'argent. Grace a ses mines d'or et d'argent également, les Espagnols se sont enrichis a outrance (on dit qu'ils auraient pu construire un pont en argent de Potosi a l'Espagne avec tout ce qu'ils avaient trouvé dans les mines), mais bizarrement pas les indigenes qui travaillaient pour eux. Ah, mais c'est peut-etre parce que chacun leur tour ils restaient a l'intérieur de la mine pendant 4 mois et que quand ils sortaient, ils devenaient aveugles (pour ceux évidemment qui avaient eu la chance de survivre aux éboulements, gaz toxiques et explosions). Difficile de s'enrichir dans ces conditions... Un petit chiffre pour enfoncer le clou : 8 millions d'indiens et d'africains sont morts dans d'affreuses souffrances pendant cette période.
En tout cas, a un moment, il n'y a plus eu ni argent ni or (ca peut etre tres rapide un pillage, non?) et ils ont poursuivi avec du cuivre, du zinc et de l'étain. Et aujourd'hui, encore, c'est ce que les 7000 mineurs de Potosi continuent a chercher et ramasser...
Par conséquent, la principale attraction touristique de cette ville consiste a visiter les mines! Mais attention, ce n'est pas une visite genre "regarde ils sont tout sales" ou "ah non je touche pas, c'est dégueulasse" en prenant des photos de loin. Non, non. Déja, la premiere chose qu'on fait, c'est aller acheter des cadeaux aux mineurs. Des cadeaux un peu particuliers d'ailleurs : coca pour supporter l'altitude et la faim, cigarettes, alcool a 95 % et dynamite!
Ensuite, on arrive en haut de ce fameux "cerro" (montagne), d'ou on a une vue splendide sur la ville et les autres montagnes qui l'entourent :
Puis, on arrive a la coopérative miniere. Oui, car les mines appartiennent aux mineurs, ils vendent ce qu'ils trouvent, aucune entreprise privée étrangere ou bolivienne n'intervient la-dedans. L'appréhension de revivre ce qu'avaient vécu leurs ancetres a peut-etre joué un role dans ce changement de propriétaire!
Et c'est parti...
Devant, c'est moi, pas rassurée pour un sou ( euh, c'est-a-dire que les endroits fermés et noirs, j'aime pas trop trop). Le début est difficile : il faut presque courir car beaucoup de chariots passent et on veut éviter au maximum de déranger les mineurs dans leur travail. Mais, courir a 4200 m d'altitude courbée dans une mine....
On va jusqu'au trou d'ou ils sortent des seaux remplis par des mecs qui se trouvent encore plus bas (il y a 3 niveaux en-dessous de nous). Il fait chaud, il y a de la poussiere, mais a ce qu'on nous dit, c'est bien pire en bas. Dans certains endroits, on atteint 45 degrés de chaleur et on se voit a peine a cause de la poussiere degagée par les marteaux-piqueurs en marche.
La, on discute avec les mineurs. Notre guide, ancien mineur lui aussi, nous traduit la plupart du temps, car ils préferent parler en quechua.
C'est Germinal au XXIe siecle. La plupart utilisent encore des pioches, ils poussent les chariots et descendent aux étages inférieurs dans les seaux que vous voyez sur la photo ci-dessus. Il y a des gamins de 13 ans qui aident leur pere pendant les vacances scolaires. Sympa les vacances... La plupart de ces gens n'atteignent pas les 50 ans, bouffés par la "silicosis". On se croirait vraiment dans un Zola. Quel choc.
A chaque mineur rencontré, on offre un peu de nos cadeaux. Antoine mettra meme la main a la pate :
D'apres les mineurs, le pouvoir de Dieu s'arrete a l'entrée des mines. Ici, c'est les enfers, la maison du Diable. Ils ont donc appris a respecter et vénérer celui qui a droit de vie et de mort sur eux. Dans chaque mine, on trouve une sculpture du Tio pres de laquelle ils déposent des offrandes (coca, alcool, cigarettes) pour que leur présence ne l'énerve pas :
En tout, on sera restés 2h30 dans la mine. Quand on pense qu'avant, ils y restaient 4 mois sans voir la lumiere du jour, on a du mal a imaginer comment ils faisaient pour supporter.
A la sortie, on a droit a quelque chose de rigolo : une démonstration de dynamite!
Pour finir, une petite photo des mineurs en train de macher de la coca a leur pause midi (ils ne mangent pas) :
Quelques jours plus tard, on a vu un film génial : "The devil's miner" qui suit une famille dont les 2 enfants travaillent dans une mine de Potosi. Le film est juste et réel. Donc, si vous avez envie d'en savoir un peu plus...